La six-chevaux des vacances, Robert Doisneau

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Titre : La six-chevaux des vacances. 2. Nature : Photographie, en noir et blanc, de Robert DOISNEAU, datant de 1939. Photographie prise à Raizeux, près.
La six-chevaux des vacances, Robert Doisneau

I Présentation de l’œuvre 1. Titre : La six-chevaux des vacances 2. Nature : Photographie, en noir et blanc, de Robert DOISNEAU, datant de 1939. Photographie prise à Raizeux, près de Rambouillet, où il avait séjourné chez son grand-père dans son enfance et où il possédait une maison de campagne ; où il est enterré avec son épouse. Le sujet : le départ en vacances. 3. Biographie (doc.3 p.155) : Robert Doisneau (1912-1994)

Doisneau est l’un des photographes français les plus populaires de l’après-guerre et l’un des principaux représentants de la photographie humaniste avec Willy Ronis et Edouard Boubat. Le courant humaniste a pour sujet les gens simples, dans leurs bonheurs et difficultés du quotidien. Après des études d’art graphique, il entre dans la vie active en dessinant des étiquettes pharmaceutiques. Très vite il se passionne pour la photographie, travaille pour les usines Renault dans les années 1930 puis devient photographe indépendant pour l’agence Rapho. Il vend alors ses photos à des magazines tels le Point, Vogue ou Paris-Match. Ses photos sur le peuple de Paris, en noir et blanc, font le tour du monde dont le fameux Baiser de l’hôtel de ville (1950).

II Le contexte Robert Doisneau prend cette photographie alors que, depuis trois ans, en 1936, les salariés français ont obtenu deux semaines de congés payés. L’alliance de Front populaire a remporté les élections législatives en 1936 : les 2 semaines de congés payés ainsi que la réduction du temps de travail hebdomadaire à 40 heures font partie des mesures emblématiques du gouvernement de Léon Blum. Pour la première fois, des Français modestes peuvent partir en vacances. Doisneau travaille alors pour Renault : la voiture représentée est une Renault NN des années 1925 carrossée en coupé deux places avec un coffre à bagages qui pouvait faire aussi deux sièges.

III Description et sens de cette photographie La voiture et les trois personnes, tout sourire et saluant le photographe, sont au premier plan. Au second plan, un paysage rural avec un pré, un bois, une ferme. Plusieurs indices soulignent que c’est le temps des vacances : les bicyclettes, les bagages, les sacs qui contiennent sans doute des tentes de camping (les milieux modestes n’avaient pas les moyens de louer un appartement ou d’aller loger à l’hôtel), la gaîté des personnages. Quelle vision du monde Doisneau a-t-il voulu montrer ? Cette œuvre traduit une atmosphère de joie, d’insouciance, de bonheur. Doisneau aime photographier les milieux populaires : on peut penser qu’il éprouve de la sympathie pour ces jeunes insouciants à la veille de la Seconde Guerre mondiale. L’atmosphère de cette photo est résolument optimiste. Doisneau au travers de cette photographie montre l’amélioration de la condition ouvrière, sensible depuis le début du XXème siècle, grâce à l'action des syndicats, des partis socialistes (SFIO et PCF), et au progrès de la législation sociale. Le niveau de consommation des ménages s'élève lentement au cours des années 1930 : même si les ouvriers consacrent encore une part importante de leur budget à la nourriture et au logement (70%), la part de leurs revenus consacrée aux soins personnels et aux loisirs augmente. Les ouvriers découvrent de nouveaux loisirs comme le cinéma. Ils découvrent aussi les vacances. L’époque du Front populaire représente un vrai progrès pour la condition ouvrière et marque durablement les esprits.

IV Mise en relation avec une autre œuvre artistique Y a d’la joie Une chanson française écrite et composée en 1936 par Charles Trenet, l'une des plus connues de son répertoire et qui l'a rendu célèbre auprès du public. Il émane de cette chanson comme de la photographie de Doisneau un très grand optimisme qui représente un contraste avec la crise des années 1930. Sur un rythme entraînant avec des phrases simples et des paroles optimistes, la chanson avec légèreté évoque l’amour, la joie de vivre, en s’appuyant sur des scènes de la vie quotidienne (un boulanger qui fait son pain, un facteur qui distribue son courrier) qui rappellent le courant humaniste en photographie. Le boulanger de Saint Véran, 1947, par Doisneau

Cette chanson correspond bien à l'air du temps de l'époque : elle arrive dans un contexte d'insouciance, à l'heure où les réformes sociales du Front populaire font découvrir les loisirs et les vacances aux Français quelques années avant que ne débute la Seconde Guerre mondiale. P.S. : Dans la 2ème partie, le narrateur finit par s'apercevoir qu'il était en train de rêver et que le « ciel est gris ». Pas étonnant quand on sait que cette chanson a été écrite par Trenet alors qu'il effectuait son service militaire, où il s'ennuie beaucoup. Il confiera par la suite qu'il l'a créée pour se donner du courage en balayant la cour de la caserne.