Quelques repères sur l'histoire des musées - Cndp

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conception contemporaine du musée comme lieu de conservation des collections et met ces dernières à disposition « à la seule fin de la délectation des ...
Quelques repères sur l’histoire des musées Le mot « musée » vient du grec mouseion, petite colline où séjournent les muses. Dans l’Antiquité, le musée associe deux types de pratiques. La première, sous forme de centre de collections, salle de lecture, amphithéâtre, ménagerie et jardin botanique, réunit scientifiques et savants. Elle a pour vocation essentielle d’être pédagogique et étudie les collections. La seconde se rapproche de notre conception contemporaine du musée comme lieu de conservation des collections et met ces dernières à disposition « à la seule fin de la délectation des amateurs », pour reprendre Pausanias dans sa Description de la Grèce. Sous le règne de l’empereur Auguste, les collections d’art connaissent un succès fulgurant. Les œuvres grecques confisquées à l’ennemi sont exposées et rassemblées dans des lieux publics dans le but politique de montrer la suprématie de Rome. Au Moyen Âge, les premières collections retracent la vie quotidienne : travaux des champs ou calendriers des saisons qui « parlent » au peuple comme le font aujourd’hui les écomusées. Les grandes cathédrales, en rassemblant des reliques, assimilent le musée à un mausolée. Les grands bourgeois possèdent des collections privées composées essentiellement des travaux artisanaux de leur époque. C’est ainsi que progressivement, l’artisan anonyme deviendra un artiste. Mu par sa volonté de comprendre le monde, l’homme du xvie siècle n’accumule pas les œuvres d’art de façon mercantile mais entretient avec elles un dialogue privilégié ; il veut les analyser et les comparer. Le développement des cabinets de curiosité reflète le goût de l’époque pour l’exceptionnel, le rare, l’étrange. Ainsi, François Ier réunit-il une remarquable collection d’œuvres en provenance du Brésil. Au xviie siècle, le pouvoir se mesure à l’importance des collections. Le roi commande des œuvres qui témoignent du présent, incarnent sa puissance et sont, à cette fin, montrées aux amateurs et aux artistes éclairés. Le siècle des Lumières et la Révolution française vont bouleverser l’approche muséale. Ainsi, le statut de l’œuvre d’art change et il revient au musée d’éduquer le peuple, de lui permettre l’accès au Beau. En résumé, il contribue à ce que l’art devienne public et les philosophes s’insurgent contre la pratique des collectionneurs privés qui ne permettent pas à la société de profiter des œuvres. Ce n’est pourtant qu’en 1791 que le musée du Louvre est affecté à la « conservation des œuvres des sciences et des arts ». L’État consacre alors un budget pour créer des lieux de conservation d’un patrimoine commun. Désormais, ce musée a pour vocation de former le goût du public, d’acquérir des œuvres, d’inventorier, de classer, d’authentifier et de restaurer. La muséologie, qui apparaît à cette époque, a ainsi pour but d’étudier le rôle du musée dans la société.

Au xixe siècle, les musées, faute de financement et de personnels compétents, sont souvent vétustes et les collections ne sont guère mises en valeur. Bien qu’ouverts à tous, ils restent populaires – seules les expositions universelles attirent une foule bien plus importante – et sont essentiellement fréquentés par une bourgeoisie érudite à la recherche du plaisir esthétique. Le xxe siècle, poursuit d’abord la lancée xixe en créant un nombre impressionnant de musées : scientifiques (palais de la Découverte en 1936), commémoratifs (Clémenceau), de collectionneurs (Camondo), d’artistes (Rodin), d’histoire spécialisée (musique, médecine…). À partir des années soixante-dix, on assiste à une hyperconsommation muséale. Tous les pays possèdent leur musée et tout semble pouvoir y entrer (musée de la chicorée ou du chocolat, musée de la bicyclette ou du bonbon…). Jean Clair a sans doute raison de nous mettre en garde contre cette véritable manie qui consiste à faire du musée un véritable bazar : « Le musée étendant ses collections jusqu’aux marches les plus excentrées de la création finit par oublier, sinon démentir, ce pour quoi il a été crée. » On peut aussi constater que les grandes expositions attirent de plus en plus de monde à grand renfort de médiatisation en tous genres : le musée se doit désormais d’être rentable et la qualité d’une exposition est jugée à l’aune de ses entrées. Dans cet esprit, les œuvres sont mises en scène pour être plus attractives.