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Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains Recommandations concernant les migrations dans le monde arabo-africain adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme (INDH)

Le Caire, Égypte

Les dénominations utilisées dans cette publication et la présentation des données qui y figurent n’impliquent de la part de l’UNESCO aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones cités, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières ou limites. Les auteurs sont responsables du choix et de la présentation des faits rapportés dans cet ouvrage ainsi que des opinions exprimées, lesquelles ne sont pas nécessairement celles de l’UNESCO et n’engagent pas l’Organisation.

Ces Recommandations sont celles du Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains et n’engagent pas l’UNESCO.

Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite sous quelque forme que ce soit, ou par un quelconque procédé, sans l’autorisation écrite de l’UNESCO. Toute demande concernant cette publication peut être adressée à : Section Philosophie et démocratie Division des Droits de l’Homme, de la philosophie et de la démocratie Secteur des Sciences sociales et humaines UNESCO 1, rue Miollis 75732 Paris Cedex 15, France Tél. : +33 (0)1 45 68 45 52 Fax : +33 (0)1 45 68 57 29 E-mail : [email protected] ; [email protected] Photos, mise en page et impression : © UNESCO Publié par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture 7, place de Fontenoy, 75352 Paris 07 SP, France © UNESCO 2010 Imprimé en France SHS-2010/WS/7 – cld 1143.10

Après une brève analyse des migrations dans le monde arabo-africain et des défis qu’elles posent, cette brochure définit le rôle des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’Homme qui respectent les Principes de Paris, et insiste sur la nécessité pour elles de s’engager en faveur de la protection des droits humains des migrants. Elle détaille ensuite les Recommandations concernant les migrations dans le monde arabo-africain adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme (INDH), qui ont été adoptées par les participants au Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains réunis en 2009 au Caire (Égypte).

Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains

Résumé

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Le Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains, lancé en 2008 par l’UNESCO et le Conseil national des droits de l’Homme d’Égypte, est une plateforme destinée à permettre un dialogue permanent entre les sociétés civiles, les élus parlementaires, les acteurs publics concernés, les organisations régionales ainsi que les institutions spécialisées du système des Nations Unies, en vue d’examiner, de discuter et de repenser la situation de la démocratie et des droits humains en Afrique et dans le monde arabe. Lors de la réunion annuelle du Forum qui s’est tenue en décembre 2009 au Caire (Égypte) sur le thème « Les migrations dans le monde arabo-africain », les participants ont adopté les Recommandations adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme (INDH) qui sont exposées dans le présent document. La réunion du Forum a été organisée avec le soutien de l’Organisation internationale de la Francophonie et de la Ligue des États arabes.

Mme Irina Bokova, Directrice générale de l’UNESCO

M. Boutros Boutros-Ghali, Président du Conseil national des droits de l’Homme d’Egypte et Vice-président du Forum

Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains

INTRODUCTION

M. Abdou Diouf, Secrétaire général de la Francophonie et Président d’honneur du Forum

M. Pierre Sané, Sous-Directeur général pour les Sciences sociales et humaines de l’UNESCO

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Recommandations concernant les migrations dans le monde arabo-africain adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme

LES MIGRATIONS DANS LE MONDE ARABO-AFRICAIN L’Afrique et le monde arabe sont des régions où la mobilité humaine est déjà ancienne. Aujourd’hui, dans un monde de plus en plus interconnecté où de plus en plus de gens voient dans la migration une possibilité de s’émanciper, de vivre plus en sécurité ou d’améliorer leur situation socioéconomique, il est indispensable de repenser en profondeur les politiques qui régissent les mouvements de population. Dans ce contexte, il est nécessaire de permettre aux États et aux sociétés d’origine, de transit et de destination de mieux faire face aux défis posés par les migrations transfrontalières. Les pays d’Afrique du Nord ont, par exemple, été d’importants États de départ ; ils sont désormais devenus des pays de transit, et donc des régions d’immigration de facto pour les flux de population en provenance des pays voisins du sud. En Afrique de l’Ouest, les flux de migration intra-régionaux ont toujours été importants dans une région attachée à la libre circulation de ses citoyens. La demande concernant les possibilités de migration externe augmente, en particulier à destination de l’Europe, ce qui entraîne des défis considérables en termes de politique et de droits humains. L’Afrique australe connaît elle aussi une mobilité humaine très forte, tandis que dans plusieurs autres sous-régions, des conflits armés ont contraint des milliers de personnes à quitter leur domicile, le plus souvent pour gagner des pays voisins. La région du Golfe attire l’un des flux migratoires les plus importants de la planète, que ce soit en données absolues ou relatives. Les fonds envoyés par ces migrants peuvent jouer un rôle important dans la réduction de la pauvreté et le développement de leurs régions d’origine. Bien que l’on relève une extrême diversité dans les schémas migratoires ainsi que dans la direction et le volume des flux, plusieurs éléments clés caractérisent le phénomène migratoire dans le contexte actuel de mondialisation. Fait important, les migrants représentent le plus souvent des populations particulièrement vulnérables aux violations des droits humains, surtout s’ils sont en situation irrégulière. Les tensions qui existent entre eux et les populations des pays d’accueil constituent aussi pour ces derniers un défi permanent sur le plan du maintien de la cohésion sociale. Enfin, les crises majeures qui marquent le monde d’aujourd’hui, notamment les crises économiques et environnementales, ont des répercussions profondes sur les migrations. Tous les gouvernements sont confrontés à cette difficulté ainsi qu’à la tâche délicate de gérer des flux de population extrêmement complexes.

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Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains

La plupart d’entre eux commencent seulement à se pencher sur ces questions. Pourtant, les migrations seront sans aucun doute une composante centrale du XXIe siècle et leur gouvernance constitue un défi majeur de notre époque aux niveaux national, régional et international, suscitant en particulier des préoccupations croissantes liées au risque de violation des droits humains des migrants.

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Recommandations concernant les migrations dans le monde arabo-africain adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme

LES INSTITUTIONS NATIONALES DES DROITS DE L’HOMME (INDH) En 1992, la Commission des droits de l’homme des Nations Unies a approuvé un ensemble de principes reconnus au niveau international et portant sur le statut, les pouvoirs et le fonctionnement des institutions nationales des droits de l’Homme (INDH). Connus sous le nom de Principes de Paris, ils ont été par la suite approuvés par l’Assemblée générale des Nations Unies en 19931. Ces Principes exposent les lignes directrices qui, conformément aux recommandations des Nations Unies, doivent guider la création d’une institution nationale des droits de l’Homme. Selon la définition qu’en donne l’ONU, une institution nationale des droits de l’Homme est un organe gouvernemental créé en vertu d’un texte constitutionnel ou législatif, ayant spécifiquement pour mission de promouvoir et de protéger les droits humains. L’ONU classe généralement les institutions nationales des droits de l’Homme en trois catégories : les commissions des droits de l’Homme, les médiateurs et les institutions nationales spécialisées visant à protéger les droits de groupes particulièrement vulnérables tels que les minorités ethniques, les populations autochtones, les réfugiés, les femmes ou les enfants. Les Principes de Paris soulignent les caractéristiques essentielles nécessaires au maintien de l’indépendance de ces institutions, à savoir : un texte fondateur constitutionnel ou législatif, un mandat aussi étendu que possible, des procédures de nomination indépendantes, la durée du mandat (qui doit être précisée dans un acte officiel), une composition pluraliste et représentative, un fonctionnement régulier et efficace, une indépendance visà-vis du pouvoir exécutif et un financement suffisant. Tout en recommandant des modalités de fonctionnement, les Principes de Paris demandent aux gouvernements de créer des institutions qui soient en mesure

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Les Principes de Paris ont été définis à l’occasion des premières Rencontres internationales des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (7-9 octobre 1991, Paris) et adoptés par la Commission des droits de l’homme de l’ONU dans sa résolution 1992/54 de 1992 et par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 48/134 de 1993. Les Principes de Paris sont disponibles sur le site Internet: http://www1.umn.edu/humanrts/instree/Fparisprinciples.pdf [Consulté le 29 avril 2010]

 promouvoir l’harmonisation des lois et pratiques nationales conformément aux normes internationales des droits humains, notamment par la ratification des traités internationaux ;  fournir aux gouvernements des rapports et des recommandations sur les questions des droits humains (y compris des recommandations concernant l’adoption ou la modification des législations nationales et des rapports concernant les cas de violation des droits humains) ;

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d’examiner librement toutes les questions relatives aux droits humains, que ce soit de leur propre initiative, sur proposition du gouvernement, ou à la demande de « tout requérant ». Il a notamment été prévu qu’elles puissent :

 coopérer avec les organismes des droits humains nationaux, régionaux et onusiens, entre autres en contribuant aux rapports que les pays doivent présenter aux organes et comités de supervision des traités de l’ONU ;  contribuer aux programmes d’éducation aux droits humains.

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Recommandations concernant les migrations dans le monde arabo-africain adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme

Les commissions des droits de l’Homme sont surtout habilitées à faire des déclarations publiques sur leur travail, directement ou par voie de presse. Les Principes de Paris appellent les commissions des droits de l’Homme à coopérer et à entretenir une concertation avec les autres organes chargés de la protection et de la promotion des droits humains et ils soulignent en particulier l’importance d’une coopération effective avec les ONG qui se consacrent à la promotion et à la protection des droits humains, les syndicats, les organisations socioprofessionnelles concernées, les chercheurs reconnus, les philosophes, les dirigeants religieux, les universitaires et les experts qualifiés, les institutions parlementaires, ainsi qu’avec les autres administrations (à titre consultatif seulement). Aux termes des Principes de Paris, les fonctions confiées à une commission des droits de l’Homme devraient inclure la capacité de rechercher un règlement amiable par la « conciliation », par des « décisions contraignantes » ou, « le cas échéant, en ayant recours à la confidentialité », et de faire des recommandations aux autorités compétentes sur les questions relatives aux droits humains, notamment en proposant des adaptations ou modifications des lois et pratiques. À cet égard, les INDH ont un rôle important à jouer dans la protection et la promotion des droits humains des migrants en Afrique et dans la région arabe.

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1.

Les INDH devraient encourager les États qui ne l’ont pas encore fait à ratifier et appliquer toutes les conventions internationales des Nations Unies relatives aux droits humains, et en particulier les suivantes :

 la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille de 19902 ;

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RECOMMANDATIONS ADRESSÉES AUX INDH

 la Convention relative au statut des réfugiés de 19513 ;  le Protocole relatif au statut des réfugiés de 19674 ;  la Convention de l’OIT n° 97 de 1949 concernant les travailleurs migrants5 ;  la Convention de l’OIT n° 143 de 1975 sur les migrations dans des conditions abusives et sur la promotion de l’égalité de chances et de traitement des travailleurs migrants6. 2.

Les INDH devraient demander aux États d’aligner leur législation nationale sur les normes internationales relatives aux droits humains, notamment s’agissant des droits des migrants et des réfugiés, et d’appliquer les lois et règlements nationaux en matière de travail aux travailleurs migrants, notamment à ceux en situation irrégulière ainsi qu’aux travailleurs domestiques migrants. Les accords bilatéraux entre États, y compris les accords de réadmission, doivent inclure des garanties concernant le respect des droits des migrants.

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Disponible sur le site Internet suivant : http://www2.ohchr.org/french/law/cmw.htm [Consulté le 29 avril 2010] Disponible sur le site Internet suivant : http://www2.ohchr.org/french/law/refugies.htm [Consulté le 29 avril 2010] Disponible sur le site Internet suivant : http://www2.ohchr.org/french/law/refugies_ protocole.htm [Consulté le 29 avril 2010] Disponible sur le site Internet suivant : http://www.ilo.org/ilolex/cgi-lex/convdf.pl?C097 [Consulté le 29 avril 2010] Disponible sur le site Internet suivant : http://www.ilo.org/ilolex/cgi-lex/convdf.pl?C143 [Consulté le 29 avril 2010]

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Recommandations concernant les migrations dans le monde arabo-africain adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme

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3.

Les INDH devraient participer à l’élaboration de politiques, stratégies et législations nationales visant à la protection des droits des migrants et des réfugiés qui arrivent ainsi que des migrants qui partent, tout en contrôlant et accompagnant leur mise en œuvre.

4.

Les INDH devraient demander aux États d’éviter la pénalisation des migrations irrégulières et de respecter le principe selon lequel la détention de migrants en situation irrégulière ne devrait être utilisée qu’en dernier recours et pour la durée la plus courte possible.

5.

Les INDH devraient rendre les pouvoirs publics et les gouvernements responsables des violations graves des droits humains en prenant la défense des migrants dont les droits ont été bafoués. Les violations incluent, de manière non limitative, les menaces contre la vie, l’intégrité physique et la dignité humaine des migrants lorsqu’ils tentent de traverser les frontières ou sont détenus par les autorités.

6.

Les INDH devraient nommer un point focal pour les droits des migrants. Dans les pays où les migrants sont nombreux, les INDH pourraient envisager de créer un bureau spécial « migrants » qui fournirait des informations fiables sur la législation et les réglementations régissant l’octroi des permis de séjour et de travail, donnerait des conseils juridiques et pratiques et, le cas échéant, aiderait les migrants à obtenir réparation en cas de violations de leurs droits en facilitant l’accès aux tribunaux et en mettant en place des dispositifs d’orientation.

7.

Les INDH devraient intégrer concrètement les droits des migrants et des réfugiés dans toutes leurs activités relatives aux droits humains.

8.

Les INDH devraient mettre en place des dispositifs pour surveiller la situation des migrants et, le cas échéant, faire rapport sur celle-ci et assurer un suivi, ainsi que pour examiner les cas de violation de leurs droits humains.

9.

Les INDH devraient assurer la promotion et la protection des droits humains des migrants et des réfugiés, sans discrimination.

11. Les INDH devraient promouvoir la collaboration avec les pouvoirs publics, la société civile, y compris les syndicats, ainsi qu’avec les organisations internationales, les organismes intergouvernementaux et toutes les parties prenantes concernées, pour renforcer la promotion et la protection des droits humains des migrants et des réfugiés.

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10. Les INDH devraient mener une action de sensibilisation afin de promouvoir la culture des droits humains et de contribuer à créer un environnement favorable à l’émergence d’une société inclusive qui reconnaisse la valeur des migrants et des réfugiés. Entre autres moyens, il faudrait faire appel aux médias et à Internet, notamment pour lutter contre la discrimination, le racisme, la xénophobie et les discours de haine. Les INDH devraient inclure dans leurs programmes de sensibilisation des informations concernant les violations des droits humains.

12. Les INDH devraient collaborer avec les acteurs de la société civile pour mener des campagnes de sensibilisation en vue de fournir des informations fiables sur les conditions de migration, notamment les risques liés au passage illégal de frontières et au trafic de clandestins, ainsi que sur les possibilités de migrations régulières et leurs avantages. 13. Dans leur interaction avec le dispositif des Nations Unies en matière de droits humains et les organes conventionnels, les INDH devraient, dans leurs pays respectifs, assurer le suivi des recommandations de ces organes et des procédures spéciales de l’ONU. 14. Les INDH devraient intensifier leur coopération aux niveaux régional et international en favorisant un dialogue et des échanges réguliers sur les bonnes pratiques et politiques dans le cadre du Forum permanent de dialogue arabo-africain sur la démocratie et les droits humains, en vue de garantir une meilleure protection des droits humains des migrants et des réfugiés. 15. Les INDH devraient élaborer des plans d’action pour garantir la mise en œuvre des présentes Recommandations et faire régulièrement rapport au Secrétariat exécutif du Forum des actions entreprises.

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Recommandations concernant les migrations dans le monde arabo-africain adressées aux institutions nationales des droits de l’Homme

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CONCLUSION Dans un monde où les mouvements de population vont en s’intensifiant, les pays arabes et africains sont tous devenus à la fois des pays d’accueil et de départ. La protection des droits des migrants résidents ou en transit serait donc un avantage pour l’ensemble des États de ces deux régions. En attendant, les populations migrantes restent vulnérables dans de nombreux pays, où elles sont privées de leurs droits et victimes d’ostracisme. Il s’agit là clairement d’une priorité en matière de droits humains sur laquelle les INDH doivent se pencher de toute urgence. Elles sont encouragées à utiliser ces Recommandations afin de mettre au point des plans d’action et à faire régulièrement rapport au Secrétariat exécutif du Forum de leur mise en œuvre.